
A l’heure où 42 % des utilisateurs qui suivent des marques sur Twitter le font pour leur service client1 , il ne fait plus aucun doute que les réseaux sociaux sont désormais un canal privilégié non seulement pour contacter une marque mais aussi pour partager une bonne ou… moins bonne expérience client. Dans ces conditions, « écouter » les réseaux sociaux, être en veille constante – à l’aide d’un système de monitoring et de datamining – n’est plus une option pour les marques. Un social listening, réputé se situer au plus près de l’expression sans filtre des clients, qui offrirait par la même occasion l’opportunité d’une prise directe et en temps réel du pouls du consommateur. Alors, adieu enquêtes et autres outils de mesure de la satisfaction client ? Pas si simple !
Si un utilisateur des réseaux sociaux sur trois favorise ce canal pour contacter un service client2 , seuls 10 % des Français y ont eu recours selon l’Observatoire des services clients 2017… Alors que 25 %2 des utilisateurs y donnent leur avis sur un produit ou service, notamment ces fameux millenials, nés entre 1980 et l’an 2000. Facebook, Twitter, mais aussi Instagram, Pinterest, voici leurs terrains privilégiés lorsqu’ils veulent partager leurs expériences ! Ainsi, l’activité d’écoute des consommateurs, à travers non seulement les réseaux sociaux, mais aussi les forums ou le micro-blogging, offre aux marques des perspectives dépassant la veille permanente pour la gestion, tant réactive que proactive, de leur relation client sur les réseaux sociaux. En recueillant de l’information auprès de populations qui ne sont pas forcément enclines à répondre à des enquêtes de satisfaction, mais n’hésitant pas à s’exprimer sur les réseaux sociaux, les marques enrichissent leurs insights pour la mesure de la satisfaction client. Pourtant, en 2016, Brandwatch3 estimait la part des marques mettant en œuvre un dispositif de social listening à un peu moins de 15 %.
Social listening, la véritable voix du client ?
Le caractère spontané des réseaux sociaux permettrait d’entendre la voix du consommateur sur les sujets qui l’intéressent, et avec ses propres mots. Nous serions donc là au plus près du ressenti client, sans filtre. Ainsi, que ce soit pour repérer les mentions produit ou celles de la concurrence, devancer les demandes, voire détecter les opportunités commerciales, mais aussi analyser la satisfaction client, certaines entreprises n’ont pas tardé à créer leur propre social room : la Digital Acceleration Team de Nestlé, le Social Hub Orange ou encore la Love Team chez OUI.sncf.
Les indicateurs privilégiés pour recueillir et exploiter la voix du client sont multiples : nombre d’occurrences d’un mot-clé, analyses de posts et commentaires, profil des émetteurs, nombre de likes ou de (re-)tweets, mots-clés secondaires, etc. Le travail de synthèse est ensuite effectué par des data scientists qui traduiront la donnée brute en tendances, sentiments, réactions… et recommandations.
Cependant, Rémi Douine, fondateur de The Metrics Factory, rappelle combien les usages ne cessent de se transformer avec, par exemple, le post de blog devenu professionnel, voire lucratif et donc moins « spontané » ou encore le formatage par les plateformes sociales à l’instar du retweet plus « automatique » depuis la création par Twitter de la fonction RT et, par-là, moins significatif des intérêts authentiques des utilisateurs. Le social listening est « la résultante de plusieurs plaques tectoniques mouvantes du web »4, et les solutions d’écoute ne permettent que trop peu d’identifier des signaux précis, il s’agit d’outils qui sont avant tout conçus pour faire émerger des tendances générales.
Social listening, signal ou simple bruit ?
Autant de fragilités potentielles du social listening, auxquelles s’ajoute la difficulté à recueillir une information représentative et détaillée, compte tenu des limites imposées par la loi et par les réseaux sociaux eux-mêmes sur les données personnelles. En pratique, l’analyse des comptes individuels demeure fastidieuse, et une grande partie de l’activité des utilisateurs reste à la discrétion des plateformes. Réaliste, Rémi Douine estime qu’ « il faut faire le deuil d’une ambition scientifique et assumer la nature mouvante de l’écoute des médias et des réseaux sociaux ».
Conséquence : malgré sa capacité à faire émerger des insights consommateurs inédits, le social listening ne peut se substituer aux outils de mesure de la satisfaction client. Tout l’enjeu, dès lors, est de réussir à combiner efficacement les deux approches. C’est le point de vue défendu par la majorité des professionnels, rappelle Arielle Bélicha-Hardy, Chief Expertise Officer – Employee and Customer eXperience chez Kantar TNS.
Si l’écoute des réseaux sociaux donne à entendre une voix instantanée proche du registre émotionnel des clients, capable d’apporter des enseignements sur les interactions entre marque et consommateur (campagne publicitaire, appel au service client, etc.), les études menées auprès d’échantillons représentatifs de clients, permettent quant à elles de couvrir un large spectre de la perception client offrant ainsi une vision plus complète. Mais à l’heure où les consommateurs sont de plus en plus enclins à partager publiquement leurs expériences, ce contenu, appelé user generated content, devient un facteur influent dans les décisions d’achat. Il devance le référencement de 8 points et l’e-mailing promotionnel de 12 points5… et offre par là-même de belles perspectives aux marques qui sauront s’appuyer sur le social listening pour se saisir de nouvelles opportunités commerciales.
1 Twitter France – Février 2016
2 Social media report – Nielsen – 2016
3 Le social listening en pratique : benchmarking concurrentiel – Brandwatch – 2016
4 Social media listening : du bruit au signal – 2016
5 SmartInsight.fr
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